Artiste peintre figuratif, autodidacte, Roger Cantin est né à Québec en 1930 (décès en 2018). Il termine ses études à l’École des beaux-arts de Québec en 1964 pour débuter sa carrière de peintre figuratif. Dans ses tableaux, il utilise l’aquarelle et la peinture à l’acrylique. Ses œuvres se distinguent par sa maîtrise de l’espace (composition), de la forme (simplicité) et de la couleur (utilisation de noir, blanc, bleu, vert, jaune, ocre souvent dominés par des tonalités de gris).
Un style pictural figuratif
Cantin est un artiste sensible et réservé qui s’imprègne de l’âme des objets et des paysages qu’il peint. Il peint avec une vision intérieure des choses, il s’inspire de son sujet plutôt que de le copier. Cantin affectionne tout particulièrement les maisons québécoises, les rues du vieux Québec, les scènes d’intérieurs, les paysages et les natures mortes.
« La peinture de Roger Cantin constitue un trésor bien gardé, comme pour se mettre à l’abri des regards indiscrets des amateurs trop pressés. Sans être un acte timide, sa peinture exprime, avec une infinie délicatesse, l’intimité d’un homme à la fois tranquille et inquiet. Les différentes tonalités de gris qui caractérise tant son approche expriment cette fragilité de l’être se mouvant dans la vie en tentant d’esquiver les heurts. Cette quiétude sourde et pourtant bien perceptible cache une émotivité vive. En somme, l’œuvre de Roger Cantin gagne à être regardée, cajolée du regard, pour enfin révéler toute la force du métier de ce peintre hors du commun et du temps. Bien connu pour ses paysages et ses natures mortes – construites autour de ses trouvailles dans les brocantes –, son art s’enrichit aussi de personnages, peints avec une grande simplicité et amenés au regard avec beaucoup de tendresse. » Robert Bernier
Artiste peintre québécois, les tableaux de Cantin font partie de bon nombre de collections publiques et privées. Il est représenté par une douzaine de galeries d’art contemporain au Québec.
Roger Cantin (1930-2018)
Voilà maintenant plus de trois décennies que l’étoile de Roger Cantin brille dans le firmament de la peinture figurative traditionnelle québécoise. Calme, méditatif, contemplatif, l’artiste cherche par la peinture à traduire cet état paisible qui l’habite. Il s’agit toutefois d’une paix relative, car sous cette apparence de douce quiétude se cache une certaine fébrilité intérieure, une angoisse sourde, une délicate appréhension du monde. Cultivant son côté sauvage, solitaire, Cantin arpente les rues du Vieux-Québec ou de son voisinage immédiat, en banlieue nord du Québec, en quête d’objets ou de points de vue inspirants. Il fait régulièrement la tournée des antiquaires de la rue St-Paul pour le plaisir de découvrir de vieux objets qui, un jour ou l’autre, lui serviront de modèle.
Le rapport qu’il tisse avec les objets qu’il amasse – théières, pots, jouets, boîtes, etc. – n’est pas vide. Il suffit d’observer l’artiste en présence de ses trouvailles pour se rendre à quel point l’individu se transforme à leur contact: il sent, ressent, palpe la forme, s’en imprègne, puis, au bout d’un instant, son visage s’illumine. L’objet devient sien, et cela, bien au-delà de l’appartenance physique.
Dans l’ensemble de la production picturale figurative, un univers largement régit par la tradition, l’oeuvre de Roger Cantin se distingue à plusieurs égards. D’abord, il a su imposer son style, et ce, non par carriérisme, mais par la force des choses. Le succès est venu malgré lui, le prenant presque à rebrousse-poil, les amateurs et les collectionneurs ayant exercé, par leur enthousiasme, une pression qui ne lui laissait guère le choix. C’est ainsi que ses paysages urbains, ces vieux quartiers qui prennent vie sous une palette dominée par les gris, se sont lentement mais sûrement taillé une place sur les cimaises du Québec. Les perspectives tronquées et les larges aplats qui asservissent les tons de gris, les scindant ou les unissant au grec de l’inspiration du créateur, sont autant d’éléments de son œuvre qui élèvent sa peinture vers cette délicate fébrilité qui constitue sa marque distinctive en tant qu’artiste.
Cantin n’a pas la prétention de réinventer la peinture, pas plus qu’il ne se pose en théoricien. Son langage plastique appartient à la tradition de la modernité qui apporta, au début du xxe siècle, un éclairage nouveau sur la façon de traduire la réalité physique. Aujourd’hui, cette tradition continue d’influencer nombres d’artistes. Cantin a su lui trouver un registre qui lui est propre : une base expressive où s’inscrit un double besoin de scruter les recoins de ses souvenirs et de concevoir un monde en transit entre l’être et le non-être, entre la noirceur et les nuits blanches.
Source : Robert Bernier, La peinture au Québec depuis les années 1960, Les Éditions de l’Homme, 2002, Cantin Roger Cantin (1930), pages 302-303.