Grand maître canadien, l’artiste peintre contemporain Léon Bellefleur, ARC (Académie Royale du Canada) est né à Montréal, Québec le 8 février 1910 (décédé le 22 février 2007). Il a obtenu son diplôme de de l’École normale Jacques Cartier de Montréal en 1929 et enseigne durant 25 ans à l’école primaire de la Commission des Ecoles catholiques de Montréal tout en suivant les cours à l’Ecole des beaux-arts de Montréal de 1929 à 1938.
Un grand peintre surréaliste
La première exposition de ses œuvres a lieu en 1946. Il signe le manifeste Prisme d’Yeux en 1948 dirigé par Alfred Pellan. En 1951, il obtient le premier prix de peinture moderne au Salon du Printemps du Musée des Beaux-Arts de Montréal et en 1953 il se joint au mouvement automatiste. En 1977, il est le premier récipiendaire du prix Borduas. En 1985, il reçoit le prix Louis-Philippe Hébert de la Société Saint-Jean-Baptiste et un Doctorat honorifique de l’Université Concordia en 1987. En 1989, il devient membre de l’Académie Royale des arts du Canada.
Les œuvres de Léon Bellefleur se retrouvent dans plusieurs collections publiques ou privées au Canada, au Brésil, en Angleterre et au Danemark.
Léon Bellefleur
[…] Non seulement l’enseignement ne l’empêche pas de peindre, mais il consacre beaucoup de temps à côtoyer d’autres artistes, notamment Alfred Pellan ; il s’intéresse aux courants émergents et se forge une opinion artistique. De plus, son contact quotidien avec les enfants – il est professeur au primaire – stimule sa créativité et va marquer, de manière subtile et irrémédiable, son langage plastique. Vers 1947, il publie « Plaidoyer pour l’enfant » dans la revue Atelier d’art graphiques. La poésie québécoise occupe également une place importante dans l’univers de Bellefleur : celles D’Émile Nelligan, de son ami Roland Giguère, de Gaston Miron, de Gilles Hénault et de Paul-Marie Lapointe, pour ne nommer que ceux-là. Il trouve dans la poésie une sublimation de la vie, des sentiments, des passions. Tout son être, et par conséquent toute son œuvre, vont s’abreuver à ces rencontres littéraires, poétiques et intellectuelles. La poésie agit sur sa création, mais cette influence ne se traduit pas dans le langage plastique comme tel. Elle agit plutôt sur l’inspiration artistique jaillissant de son monde intérieur. Après avoir quitté l’enseignement en 1954, Léon Bellefleur part pour Paris. Il y fait des rencontres déterminantes, dont celle d’André Breton avec qui il partage une passion pour l’ésotérisme. Après de nombreux séjours là-bas, il reviendra définitivement au Québec à la fin des années soixante.
S’amorce alors une période de recherche riche en trouvailles pendant laquelle l’artiste élabore une nouvelle approche. Si le paysage n’est pas un thème associé directement à l’œuvre de Bellefleur, il n’en demeure pas moins une source d’inspiration, tout au long de son cheminement artistique. Sa production des années soixante-dix est particulièrement intéressante à cet égard. Léon Bellefleur atteint une sérénité plastique et une maturité artistique, comme en témoigne la qualité des œuvres réalisées. Bellefleur arrive à un équilibre qui lui permet d’accorder plus de place à son univers poétique. L’artiste termine la décennie des années soixante-dix avec une série de tableaux intitulée Les volets du temps. Le titre évoque le passage des saisons, celui du passage de la vie dans la danse des cycles de la nature, mais aussi son propre passage. Il approche soixante-dix ans ; pour lui, le temps opère sur la matière, il est la révélation de l’expérience, la récompense des esprits lucides et la conscience du monde.
Source : Robert Bernier, Un siècle de peinture au Québec Nature et paysage, Les Éditions de l’Homme, 1999, Léon Bellefleur, pages 252-253.
Léon Bellefleur (1910)
Pour Bellefleur, le surréalisme est d’abord une porte qui donne accès à un univers où les réalités se fondent dans une nouvelle vision du monde. Il s’intéresse au surréalisme dès le début des années 1940. La peinture est alors une véritable passion, mais ses obligations familiales l’empêchent de s’y consacrer entièrement, ce qu’il se hâtera de faire sitôt sonnée l’heure de la retraite de l’enseignement, en 1955. Si Bellefleur a pu contenir sa passion pour la peinture jusque-là c’est que son contact quotidien avec les enfants a nourri son art d’une manière aussi fondamentale que ses lectures et ses contacts avec d’autres créateurs. Il a trouvé chez les enfants, alors qu’il était professeur au primaire, une dimension essentielle à sa démarche picturale : la spontanéité.
Cet artiste passionné et curieux a puisé son inspiration à plusieurs sources. Outre le surréalisme et les enfants, la littérature, la musique et la poésie ont profondément marqué sa peinture, bien que leur influence soit indirecte. Pour Bellefleur, c’est le sous-entendu qui importe. Sa méthode de travail en constitue le meilleur exemple. Il commence toujours un tableau sans idée préconçue, à la manière automatiste.
Puis, il observe, se laisse imprégner par les premières formes et intervient à nouveau, guidé par ce qu’elles lui suggèrent. Sa démarche donne lieu à une révélation, celle du subconscient, comme si l’on déchirait le voile d’un monde imaginaire, mystérieux et secret pour entrevoir un univers transitoire entre la réalité physique et psychique.
Le travail de Léon Bellefleur a connu plusieurs séquences au cours des années. Ses œuvres les plus recherchées aujourd’hui appartiennent aux années 1950. Il est tout de même étonnant que les toiles des années 1960 et, encore plus, celle des années 1970 retiennent si peu l’attention, quand on songe qu’il avait alors la pleine maîtrise de son langage. Après avoir tenté diverses expériences entre des espaces construits avec rigueur et d’autres fluides, l’artiste atteint un équilibre : les couleurs et les textures s’étalent avec justesse dans une plénitude plastique saisissante. Au cours des années 1980, l’artiste mène son expression vers une dimension plus aérienne où le motif s’impose. Les tableaux des vingt dernières années restent les moins appréciés de sa production. Une certaine répétition est peut-être à l’origine de ce manque d’intérêt, mais l’avenir pourra nous révéler autrement ces œuvres, en dévoilant une dimension qui serait jusque-là restée occultée.
Source : Robert Bernier, La peinture au Québec depuis les années 1960, Les Éditions de l’Homme, 2002, Bellefleur Léon Bellefleur (1910), pages 21-22.